Actualité ! Publication Gradhiva n°36 “Collectionner le vivant”
Jérôme Bosch, Le Jardin des délices (huile sur toile, détail) (c) Musée du Prado
SEMINAIRE OUVERT A TOUS. Au Muséum national d’histoire naturelle et à distance. Bâtiment d’entomologie (Grand amphi, rez-de-chaussée, sauf exception). 45 rue Buffon, Paris (métro 5 Gare d’Austerlitz, ou métro 7 Jussieu ou Place Monge. bus 24 ou 89 arrêt Buffon-Jardin des Plantes). Sans inscription préalable.
Jeudi 14h-17h : 19 octobre, 16 et 30 novembre, 14 décembre 2023, 18 janvier 2024, 1er février 2024.
Stockage sécurisé d’échantillons biologiques par l’entreprise Cell&Co (source : https://www.cell-and-co.com/offres/biobanque/) – Roseraie historique, Conservatoire et jardins botaniques de Genève (source : https://www.cjbg.ch/collections/collections-vivantes-graineterie/parties-du-jardin/roseraie-historique)
Organisateurs : Serge Reubi, Maître de conférences MNHN, CAK, Mélanie Roustan, Maître de conférences MNHN, PALOC, Mathilde Gallay-Keller, Doctorante EHESS, LAS
Contacts : serge.reubi@mnhn.fr, melanie.roustan@mnhn.fr
Programme synthétique
19/10/23: Collections végétales et vie latente
Introduction du séminaire
Anaïs Got : “Les collections des stations d’essais de semences : des ensembles au service de la rationalisation du vivant (1869-1939)”
16/11/23 : Questionner la notion de collection vivante dans des ontologies non naturalistes
Nelson Sanjad : “Living collections in an Amazonian museum : political ecology, nature control and social sensibilities (1890-1920)“
Maëlle Calandra : “Les horticulteurs collectionneurs de l’île de Tongoa au Vanuatu (Pacifique sud)“
30/11/23: Valeurs et usages des collections et biobanques de micro-organismes
Bertrand Bedhom : “Gérer une collection de cellules de vertébrés au Muséum”
Emanuele Clarizio : “Le biobanking : aspects épistémologiques, philosophiques et éthiques“
14/12/23: Présentation du numéro de Gradhiva “Collectionner le vivant” (à l’occasion de sa sortie)
Serge Reubi, Mélanie Roustan, Mathilde Gallay-Keller : Introduction au dossier spécial
Ricardo Roque : “Life on paper: colonial sciences and the archiving of dry blood (Échantillons vivants sur fiches cartonnées : science coloniale et archives de sang séché des années 1950 à nos jours)”
Samir Boumediene : “Le temps incorporé des collections. La collecte et la circulation des plantes entre l’Amérique et l’Europe au milieu du XVIIIe siècle”
18/01/2024 : Collections vivantes, du littéral au métaphorique, jusqu’au toxique
Lotte Arndt : “Prolonger la vie des collections en soustrayant le vivant – antinomies de la conservation muséale“
Vincent Cuisset : “Taxidermies, collections vivantes ? matières organiques, émotions intenses, produits toxiques et imitations de la vie… Réflexions in situ d’un professionnel des collections naturalisées”
01/02/2024 : Les insectes – en collections, en élevages – l’entomologie, les mondes marchands et la biosécurité
Invité 1 : “Collections zoologiques et élevages d’insectes” (à confirmer)
Tomas Bartoletti : “L’économie de l’entomologie au début du XXe siècle: produire des insectes pour détruire des insectes” (titre provisoire)
Programme détaillé
Séance 1. Jeudi 19 octobre 23. 14h-17h. Museum, Paris. Amphithéâtre de paléontologie, Galerie de paléontologie et d’anatomie comparée (métro Gare d’Austerlitz). Egalement à distance: lien de connexion
Collections végétales et vie latente
La “vie latente” existe à l’état naturel chez les graines, mais elle est également utilisée comme technologie de conservation dans les collections botaniques à visée scientifique, les conservatoires à visée patrimoniale ou les stocks à visée commerciale…
Serge Reubi et Mélanie Roustan (avec la collaboration de Mathilde Gallay-Keller) : Introduction. Retours et mises en perspectives.
Invité(e)s :
Anaïs Got (Histoire, Université d’Angers, TEMOS)
Les collections des stations d’essais de semences : des ensembles au service de la rationalisation du vivant (1869-1939)
Résumés, bios et bibliographie :
Résumé. (Anaïs Got) Les collections des stations d’essais de semences : des ensembles au service de la rationalisation du vivant (1869-1939) — Ou comment et pourquoi dès leurs débuts à la fin du XIXe siècle, les stations d’essais de semences, laboratoires publics dont les scientifiques et techniciens sont chargés d’analyser, évaluer, normaliser et in fine rationaliser les semences jugées utiles dans les agricultures, constituent des collections de semences. Ces collections sont des outils indispensables pour cette nouvelle activité scientifique et technique puisqu’elles constituent un support de référence qui intervient très directement dans les différentes opérations que comprennent les essais de semences. La communication présentera les usages de certaines de ces collections en en reconstituant les espaces et en expliquant la manière dont elles sont préparées, organisées, entretenues, complétées ou encore renouvelées. En outre, les différents cas présentés, issus de diverses sources nationales et des archives de l’International Seed Testing Association, seront discutés au prisme de la matérialité et la corporalité de l’expérience du travail analytique lorsqu’il rencontre ces collections.
Bio. Titulaire d’un master « Pratiques de la recherche historique » à l’Université d’Angers, Anaïs Got est doctorante à l’Université d’Angers au laboratoire TEMOS (Temps-Monde-Société) CNRS UMR 9016 avec un contrat doctoral co-financé par l’International Seed Testing Association et l’Université d’Angers. En tant qu’historienne contemporanéiste des sciences du végétal, elle réalise une thèse sur l’histoire des essais de semences dans une perspective transnationale entre le XIXe et le XXIe siècle dirigée par Yves Denéchère et co-encadrée par Cristiana Oghină-Pavie.
Biblio.
Bonneuil Christophe et Thomas Frédéric, Gènes, pouvoirs et profits Recherche publique et régimes de production des savoirs de Mendel aux OGM, Paris : Editions Quae, 2009.
Bremmer Jan et alii, A Cultural History of Gesture: From Antiquity to the Present Day, Cambridge : Polity Press, 1991.
Finlay Mark Russell, Science, practice and politics: German agricultural experiment stations in the nineteenth century, Doctor of Philosophy, Ames : Iowa State University, Digital Repository, 1992.
Galison Peter et Thompson Emily Ann, The Architecture of Science, MIT Press, 1999.
Gunn C. R., « Seed Collecting and Identification », in Kozlowski T. T (dir.), Seed biology, Volume III. Insects, and Seed Collection, Storage, Testing and Certification, New York : Academic Press, 1972, p. 55‑143.
Quidu Matthieu, Tome II : La recherche scientifique comme expérience corporelle, Paris : l’Harmattan, 2014.
TIRARD Stéphane, Histoire de la vie latente : des animaux ressuscitants du XVIIIe siècle aux embryons congelés du XXe siècle, Paris, Vuibert, 2010, 122p.
Séance 2. Jeudi 16 novembre 23. 14h-17h. Museum. 45 rue Buffon, Paris, Grand amphithéâtre d’entomologie (rez-de-chaussée bâtiment d’entomologie). Egalement à distance: lien de connexion
Questionner la notion de collection vivante en contextes non naturalistes
Lors de cette deuxième séance, nous nous intéressons à des contextes non européens et/ou non naturalistes. Des jardins entre terre et mers des îles Taonga contemporaines, aux cultures fondées sur la collection, la conservation et la circulation des ignames, au Museu Goeldi de Belem, dans le Brésil du tournant du XXe siècle, dont l’établissement des collections vivantes a suscité interrogations et frottements locaux… la pertinence et le périmètre de la notion de collection vivante seront explorés.
Invité(e)s :
Nelson Sanjad (Histoire des sciences, Museu Goeldi, Belem, Brésil)
Living collections in an Amazonian museum : political ecology, nature control and social sensibilities (1890-1920)
Maëlle Calandra (Anthropologie, IRD, URMIS et CREDO)
Les horticulteurs collectionneurs de l’île de Tongoa au Vanuatu (Pacifique sud) (intervention reportée en 2024)
Résumés, bios et bibliographie :
Abstract. (Nelson Sanjay). Living collections in an Amazonian museum : political ecology, nature control and social sensibilities (1890-1920) — The research addresses the construction of the Goeldi Museum’s botanical garden and zoo, located in the Brazilian Amazon. Three issues will be highlighted: a) the link between this space, the rubber trade and the exploration of the Amazonian territory; b) the principles that supported its construction; c) the emotions and behaviors it aroused in the local society.
Bio. Nelson Sanjad is dedicated to the social history of sciences in the Amazon region. He is Senior Researcher at the Goeldi Museum, a research unit of the Brazilian Ministry of Science, Technology and Innovation (since 2002). His current research project addresses the construction of scientific knowledge about the Amazon from a transnational perspective. He is interested in the circulation of naturalists/scientists, ideas and collections gathered at the Amazon, as well as the process of appropriation, translation and elision of native knowledge. His recent publications include the relationship of Indigenous people and museums, circulation of plants, history of zoo and botanical gardens, intertextuality in scientific works and travel reports. He also works on the biography of European scientists and explorers who lived in the Amazon, born in France, Germany and Switzerland.
Références biblio
« Au-delà du colonialisme : la sinueuse confluence entre le musée Goeldi et le peuple Mebêngôkre » [Texte intégral] Nelson Sanjad, Claudia Leonor López-Garcés, in Brésil(s). Sciences humaines et sociales, 22 | 2022
« International expositions: A historiographic approach from Latin America » October 2017 História Ciências Saúde-Manguinhos 24(3):1-42
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Abstract (Maëlle Calandra). Les horticulteurs collectionneurs de l’île de Tongoa au Vanuatu (Pacifique sud) — À Tongoa, petite île du centre du Vanuatu, chaque famille détient plusieurs jardins. Localement, le jardin recouvre plusieurs aspects : c’est un site aménagé où les principales plantes alimentaires sont cultivées sans ajout d’engrais ou de produits phytosanitaires, c’est aussi un lieu de profusion et de superflu garantissant sécurité alimentaire et indépendance économique tout au long de l’année et des récoltes. À partir de données ethnographiques et ethnobotaniques recueillies entre 2011 et 2018, cette présentation reviendra sur les types de jardins rencontrés à Tongoa, mais aussi sur les pratiques culturales que sous-tend cet espace. Cela nous conduira à analyser les relations qu’entretiennent les humains avec leurs plantes et à expliciter pourquoi ceux-ci peuvent être qualifiés d’horticulteurs collectionneurs.
Bio. Maëlle Calandra est chargée de recherche à l’IRD et membre du laboratoire Unité de Recherche Migrations et Société (UMR 8245 ; 215). Ses recherches se situent à la croisée de l’anthropologie des catastrophes, de l’anthropologie des relations humains-environnement et de l’anthropologie des migrations et portent sur le Vanuatu (Pacifique sud). Depuis 2017, elle est titulaire d’un doctorat en anthropologie sociale (EHESS Paris), co-dirigé par Philippe Descola et Pierre Lemonnier. Son projet de recherche actuel concerne l’étude du déplacement et la réinstallation forcés des habitants de l’île d’Ambae après l’éruption de leur volcan en 2018. Depuis 2023, elle est co-responsable avec S. Revet de l’enseignement « Anthropologie des catastrophes » à Sciences Po.
Références bibliographiques en lien avec l’intervention :
Calandra Maëlle 2020 — « Des Lapita au cyclone Pam : une histoire de la composition des jardins de Tongoa (Vanuatu) », Journal de la Société des Océanistes, vol. 150, n°1, pp : 93-106.
Caillon Sophie 2011 — « Ethnobotanique du cocotier (Cocos nucifera L.) sur l’ile de Vanua Lava (Vanuatu) ». Journal de la Société des Océanistes, vol. 133, n° 2, pp. 333-352.
Haudricourt André-Georges 1962 — « Domestication des animaux, culture des plantes et traitement d’autrui ». L’Homme, vol. 2, n°1, pp. 40-50.
Labeyrie Vanesse, Thomas Mathieu, Muthamia Zachary & Leclerc Christian 2016 — « Seed Exchange Networks, Ethnicity, and Sorghum Diversity ». Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 113, n°1, pp. 98-103.
Panoff Françoise 1969 — « Some facets of maenge horticulture ». Oceania, vol. 40, n°1, pp. 20-31.
Walter Annie & Lebot Vincent 2003 — Jardins d’Océanie. Paris : IRD Editions ; CIRAD, 320 p. (Guides illustrés).
Séance 3. Jeudi 30 novembre 23. 14h-17h. Museum. 45 rue Buffon, Paris, Grand amphithéâtre d’entomologie (rez-de-chaussée bâtiment d’entomologie). Egalement à distance : lien de connexion
Valeurs et usages des collections et biobanques de micro-organismes
Au cours de cette troisième séance, nous aborderons les collections de micro-organismes, tels que les bactéries, à l’aune des valeurs qui les sous-tendent et des usages qui les légitiment. S’ensuivent des questions techniques, de stockage et d’usage, mais également éthiques, philosophiques et épistémologiques.
Invité(e)s :
Bertrand Bedhom (Cytogénomique, professeur, chargé de collection, Muséum national d’histoire naturelle, Paris)
Gérer une collection de cellules de vertébrés au Muséum (annulé)
Emanuele Clarizio (Philosophie, Centre d’éthique médicale, Université catholique de Lille)
Le biobanking : aspects épistémologiques, philosophiques et éthiques
Résumés, bios et bibliographie
Abstract. (Emanuele Clarizio) Le biobanking : aspects épistémologiques, philosophiques et éthiques — Les biobanques sont des infrastructures fondamentales pour la recherche biomédicale et le développement de la génomique, dans la mesure où elles garantissent aux chercheurs l’approvisionnement de ressources biologiques. Toutefois, si on s’affranchit de cette image du biobanking comme secteur simplement subsidiaire de la recherche, on peut constater qu’il s’agit en réalité d’une activité centrale, qui possède ses propres normes et ses spécificités sociotechniques, lesquelles posent des enjeux épistémologiques, philosophiques et éthiques inédits.
Bio. Emanuele Clarizio est maître de conférences au Centre d’Éthique Médicale (CEM) du Laboratoire Ethics (EA 7446) de l’Université Catholique de Lille depuis septembre 2019. Il est docteur en philosophie de l’université de Bari en Italie depuis juillet 2015, et il a ensuite poursuivi ses recherches dans le cadre de plusieurs post-doctorats, notamment sur la question des biobanques. Ses travaux portent sur la philosophie biologique des techniques, sur l’articulation entre normes vitales, normes techniques et normes sociales en milieu médical, en vue d’élaborer des pistes de réflexion éthiques sur l’innovation dans le champ de la Santé.
Biblio
Bellivier, F. & Noiville, C., 2009, Les biobanques, Paris, PUF
Clarizio E., Chérici C., Dupont J.-C., Guchet X., Herpe Y.-E., (éds.), 2022, Conserver le vivant. Les biobanques face au défi de la médecine personnalisée, Paris, Matériologiques
Clarizio E., « Marketing no one’s goods. How biobanks are obsoleting the public/private divide and challenging bioethics », in Philosophical News, 22/2021, dossier Ethics, Health Data, and Bio-Citizenship (éds. A. Carnevale et E. Tangari), p. 123-133
Clarizio E., « La production de la valeur épistémique des ressources biologiques dans les biobanques », in E. Clarizio, C. Chérici, J.-C. Dupont, X. Guchet et Y.-E. Herpe (dirs.), Conserver le vivant. Histoire, savoirs, pratiques, Paris, Matériologiques, 2022
Clarizio E.,« Biobanks as exteriorized memories of life », in Philosophy & Technology, 35/2022
Bibliographie complémentaire
Strasser, Bruno J. “Collecting experiments.” In Collecting Experiments. University of Chicago Press, 2019. Chapter One.
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Séance 4. Jeudi 14 décembre 23. 14h-17h. Museum. 45 rue Buffon, Paris, Grand amphithéâtre d’entomologie (rez-de-chaussée bâtiment d’entomologie). Egalement à distance : lien de connexion
Présentation du numéro de Gradhiva “Collectionner le vivant” (à l’occasion de sa sortie)
Cette séance sera l’occasion de présenter le dossier spécial de la revue Gradhiva intitulé Collectionner le vivant, coordonné par les organisateurs du séminaire, et venant cristalliser les quatre premières années de présentations, de discussions et de réflexions. Nous aurons le plaisir d’accueillir plusieurs des contributeurs au numéro.
Serge Reubi, Mélanie Roustan :
Introduction. Le vivant et la collection
Invité(e)s :
Ricardo Roque (Anthropologie, histoire, Université de Lisbonne)
Samir Boumediene (Histoire des sciences, CNRS, ENS Lyon)
Résumés, bios et bibliographie
Abstract (Samir Boumediene) Le temps incorporé des collections. La collecte et la circulation des plantes entre l’Amérique et l’Europe au milieu du XVIIIe siècle — Au milieu du xviiie siècle, les collections de plantes sont un enjeu central tant pour l’histoire des sciences que pour celles du commerce, de la politique et de la colonisation. Témoins les plus visibles de ce phénomène, les réceptacles que constituent les herbiers, les jardins, les collections de graines, ne représentent qu’un moment dans un processus plus long et plus complexe, qui articule une pratique du terrain à un art de la circulation, un savoir classificatoire à un savoir-faire de la mise en culture des plantes. À travers une série d’exemples portant sur l’histoire de l’Amérique et de ses rapports avec la France, l’Angleterre et l’Espagne, sont abordées la collecte et la circulation comme des processus temporels. L’observation des végétaux, l’entretien avec les populations locales ou l’usage de caisses d’histoire naturelle ne peuvent alimenter une collection qu’à condition de synchroniser la pluralité des temps propres aux différentes entités impliquées : les êtres humains, les végétaux, les insectes, les vents et les embruns.
Bio. Samir Boumediene est historien, chargé de recherches à l’Institut d’histoire des représentations et des idées dans les modernités (Lyon). Dans le prolongement d’une thèse consacrée aux plantes médicinales du Nouveau Monde, et publiée sous le titre La colonisation du savoir. Une histoire des plantes médicinales du “Nouveau Monde” (1492-1750), il étudie l’évolution des savoirs et des arts à l’époque moderne. Il réalise dans ce cadre une recherche sur l’histoire des questionnaires et sur l’histoire du concept de découverte entre la conquête de l’Amérique et les révolutions atlantiques.
Abstract (Ricardo Roque) Life on paper: colonial sciences and the archiving of dry blood — In this talk I explore the history of collections of dry blood on paper cards, from their origins in the sciences of serology to their uses and re-uses in contemporary genetics. I consider a revealing case of a colonial collection of dry blood samples. From the 1940s until the demise of the Portuguese colonial empire in 1974, colonial ‘anthropobiologists’ collected thousands of blood spots on paper cards with a view to map blood types and ascertain racial diversity in the Portuguese African and Asian colonies. After 1974, these colonial collections continued to be preserved and several failed attempts were made to re-use them as traces of Asian and African DNA. Yet paper technologies aimed at collecting and storing parts of the bodies of others continue to be used today. In the 2000s, the same scientists who dismissed the colonial samples went on to make new paper collections of dried blood and saliva spots from Portugal’s former colonies. Hence this presentation will reflect on this history, discussing comparatively the political, epistemic and ontological complexities related to old and new (re)uses of biomaterials on paper archives.
Bio. Ricardo Roque, historian and social anthropologist, is a Senior Research Fellow at the Institute of Social Sciences of the University of Lisbon, where he currently heads the research group on ‘Empires, Colonialism and Post-Colonial Societies’. He works on the connected histories of colonialism, human sciences, and the making of collections and archives from 1800 to the present. He is the author of Headhunting and Colonialism (Palgrave 2010) and his latest book is Imagined Racial Laboratories (Brill 2023), on critical histories of racial sciences in Southeast Asia, co-edited with Warwick Anderson.
Séance 5. Jeudi 18 janvier 24. 14h-17h. Museum. 45 rue Buffon, Paris, Grand amphithéâtre d’entomologie (rez-de-chaussée bâtiment d’entomologie) puis ateliers de taxidermie du Muséum (à partir de 15h30). Egalement à distance : lien de connexion
De la toxicité des collections (vivantes)
Cette séance renvoie aux ambivalences du rapport au vivant dans les collections : tantôt recherché et valorisé, tantôt poursuivi et chassé. La discussion portera sur la mise en collection “au risque du vivant” : ses résurgences, ses rémanences… jusqu’à envisager sa toxicité – qu’il s’agisse de mémoires qui ressurgissent, d’émotions qui débordent, ou, plus prosaïquement, d’infestations malvenues ou de produits dangereux.
Nb: exceptionnellement, la séance se partagera entre une première partie “classique” et une seconde partie de visite-discussion dans les ateliers de taxidermie du Muséum.
Invité(e)s :
Lotte Arndt (chercheuse et curatrice)
Prolonger la vie des collections en soustrayant le vivant – antinomies de la conservation muséale
Vincent Cuisset (taxidermiste, Muséum national d’histoire naturelle, Paris)
Taxidermies, collections vivantes ? matières organiques, émotions intenses, produits toxiques et imitations de la vie… Réflexions in situ d’un professionnel des collections naturalisées
Résumés, bios et bibliographie :
Résumé (Lotte Arndt). Prolonger la vie des collections en soustrayant le vivant – antinomies de la conservation muséale. La constitution du domaine de la conservation muséale en tant que science à la fin du 19e siècle coïncide avec le pic du colonialisme. Dans le cadre des missions de collecte coloniale, les musées européens ont été remplis d’objets provenant des territoires colonisés et des communautés rurales. Pour protéger les objets, souvent constitués de matériaux organiques, contre les dommages causés par les insectes, leur traitement avec des produits chimiques toxiques a rapidement été considéré comme un moyen efficace. Les musées n’ont pas été les seuls à évoluer dans ce sens, mais ont participé à l’augmentation rapide de l’utilisation de substances chimiques dans des domaines tels que l’hygiène privée et publique et l’agriculture. La présentation prendra son point de départ dans le travail d’artistes (Mathieu Kleyebe Abonnenc, Sammy Baloji, Assaf Gruber, Kapwani Kiwanga, Elvia Teotski, Pamina Sebastiao) qui questionnent les collections muséales de provenance coloniale à partir de leur gestion du vivant : alors que les musées cherchent à classer des espèces dans des ordres taxonomiques, à leur attribuer des places dans un système hiérarchique qui transpose la transformation continuelle des processus vivants en choses, les œuvres discutées investissent les endroits qui résistent ces divisions. Elles introduisent le vivant dans les collections ; elles suivent le chemin de la mue pour outrepasser l’interruption des cycles de vie, elles contestent l’interdiction du toucher, et elles se rendent sensibles au retour du toxique. À l’aide d’exemples choisis dans les collections coloniales d’Afrique de l’Ouest conservées dans les musées européens (France, Allemagne, Belgique), la présentation examinera les résidus matériels des procédés de conservation, mais se concentrera surtout sur les conséquences culturelles que les traitements chimiques ont laissées. Quel est leur impact durable dans le contexte des processus de restitution ? Quel rôle la “modernité chimique” a-t-elle joué dans l’histoire du colonialisme et dans le présent et l’avenir des collections coloniales ?
Bio. (Paris, Berlin) est chercheuse et curatrice. Dans le cadre du projet de recherche international Reconnecting Objects. Epistemic Plurality and Transformative Practices in and beyond Museums, au sein de l’équipe de Bénédicte Savoy à l’Université technique de Berlin, elle mène une recherche sur les collections toxiques, l’extractivisme, et les antinomies de la conservation dans les musées dites ethnographiques et d’histoire naturelle. Plus largement, elle accompagne le travail d’artistes qui questionnent le présent postcolonial et les antinomies de la modernité dans une perspective transnationale. Entre 2014-2021, elle a enseigné à l’École supérieure d’art et design Valence Grenoble.
Biblio. Parmi les parutions récentes et livres édités : “Poisonous Heritage: Chemical Conservation, Monitored Collections, and the Threshold of Ethnological Museums”, Museums & Society, Vol 20, No 2 (2022), Les survivances toxiques des collections coloniales, Trouble dans les collections, no. 2, 2022; Candice Lin. A Hard White Body (avec Y. Umolu), Chicago University Press, 2019 ; Les revues font la culture ! Négociations postcoloniales dans les revues culturelles africaines à Paris, Trier WVT 2016 ; Crawling Doubles. Colonial Collecting and Affect (ed. avec M. K. Abonnenc et C. Lozano), B42 2016 ; Hunting & Collecting. Sammy Baloji (ed. avec A. Taiaksev) 2016. Références complémentaires : Ariella Aïsha Azoulay et Lotte Arndt,”Désapprendre le patrimoine” https://www.rot-bo-krik.com/desapprendrelepatrimoine ; Lotte Arndt,“The Dry and the Wet. Reconfigurations of Objectification and Desire in Assaf Gruber’s film The Conspicuous Parts”, in Jana Haeckel (ed): Everything Passes Except the Past, Sternberg Press, 2021, pp. 85-112 ; “Étendre l’espace de la vie. Réagencements narratifs au seuil des collections muséales dans le travail de Kapwani Kiwanga”, dans : Elisabeth Piskernik, Gabrielle Camuset (eds): Travelling Narratives, Rabat, Marocco, Le Cube, juillet 2021.
Séance 6. Jeudi 1er février 2024. 14h-17h. Museum. 45 rue Buffon, Paris, Grand amphithéâtre d’entomologie (rez-de-chaussée bâtiment d’entomologie). Egalement à distance : lien de connexion
Les insectes – en collections, en élevages – l’entomologie, les mondes marchands et la biosécurité
Certains insectes sont collectionnés, d’autres – ou les mêmes – sont élevés… La porosité entre collection et élevage est frappante ; les croisements, convergences et contradictions entre l’une et l’autre sont particulièrement remarquables dans le domaine de l’entomologie. Les enjeux balayés sont aussi bien scientifiques, patrimoniaux qu’économiques ou sanitaires…
Invité(e)s :
Tomas Bartoletti
Economic Entomology in Plantations, c. 1870-1930s: A Multispecies History of Capitalism
Résumés, bios et bibliographie
Abstract: My project explores a paradigmatic case in the connected histories of knowledge, capitalism and the environment between c. 1880 and 1930. During this period, the propagation of pests beyond imperial and state borders challenged the cost-effective exploitation of tropical raw materials. As a response, pest control methods were at the core of the ‘War on Nature’, spreading standardised management of global plantations. A branch of the scientific study of insects, economic entomology, was thus intensively applied to improve land use, becoming a prominent field in global scientific research. The project focuses on the role of European entomologists expanding the economic frontier and profit aspirations through commodification processes in Latin America, East Africa, the Middle East and the Pacific Islands. The global circulation of knowledge about pest control has transformed socioecological dynamics in these regions, and also powerfully shaped the model of agricultural production both in tropical lands and in the European context until our times. By reassessing the development of pest control research in the tropical world, this project contributes to highlighting the interlocking of applied entomology and agricultural economics in processes of global territorialization and imperial capitalism.
Bio: Tomás Bartoletti is Senior Lecturer and SNSF-Ambizione Research Group Leader at the Chair for History of the Modern World of the Swiss Federal Institute of Technology (ETH) in Zürich. He earned his PhD from the University of Buenos Aires and read Latin American Literature and Linguistics at the University of Buenos Aires and History of Science and Technology at the University of Quilmes (Argentina). Tomás has held research positions as a Max Weber Fellow at the European University Institute (2021-2023) and as a Postdoctoral Fellow at the ETH Zürich (2019-2021). He has been also Researcher in the Gotha Research Centre (2019), the University of Erfurt (2017-2018) and the Humboldt-Universität zu Berlin (2014-2016), among others. He has published articles in journals, like Comparative Studies in Society and History, Global Intellectual History, Comparativ: Zeitschrift für Globalgeschichte und vergleichende Gesellschaftsforschung and HAU: Journal of Ethnographic Theory. An exhibition coming out of his research, Naming Natures (external pagenaming-natures.chcall_made), is planned to take place in November 2024 at the Natural History Museum of Neuchatel. Currently, he is a member of the editorial board of theCommodity Frontiers Journal. His research interests include the history of science and empire, the history of capitalism and environmental history. His current research projects focus on the history of pest control and commodity frontiers in the Global South, c. 1880-1930; and the history of Swiss science in Latin America during the 19th century. In these projects, Tomás explores the methodological intersections of material culture and transdisciplinary research, while integrating comprehensively indigenous perspectives.
T. Bartoletti, “The Transimperial Emergence of Pest Control Research: Economic Entomology between Europe and the Tropical World, c. 1890–1930.” Comparativ: Zeitschrift für Globalgeschichte und vergleichende Gesellschaftsforschung 32: 6, 704–725. 2023
E. Russell, War and Nature: Fighting Humans and Insects with Chemicals from World War I to Silent Spring, Cambridge 2001.
S. Jansen, “Schädlinge”: Geschichte eines wissenschaftlichen und politischen Konstrukts, 1840–1920, Frankfurt am Main 2003;
K. Brown, Political Entomology: The Insectile Challenge to Agricultural Development in the Cape Colony, 1895–1910, in: Journal of Southern African Studies 29 (2003) 2, pp. 529–549;
E. Melillo, Global Entomologies: Insects, Empires, and the “Synthetic Age” in World History, in: Past & Present 223 (2014) 1, pp. 233–270;
L. Straumann, Nützliche Schädlinge: angewandte Entomologie, chemische Industrie und Landwirtschaftspolitik in der Schweiz 1874–1952, Zurich 2005;
P. Triantafillou, Governing Agricultural Progress: A Genealogy of the Politics of Pest Control in Malaysia, in: Comparative Studies in Society and History, 43 (2001) 1, pp. 193–221;
J. Wang, Plants, Insects, and the Biological Management of American Empire: Tropical Agriculture in Early Twentieth-Century Hawai’i, in: History and Technology 35 (2019) 3, pp. 203–236.
Séance 7. Vendredi 2 février 24 9h30-12h30. A huis clos pour les étudiants inscrits uniquement. Museum. 45 rue Buffon, Paris, Grand amphithéâtre d’entomologie.
Séance de travail avec les étudiants.